Co-création : quand le consommateur intègre le processus de conception

17.09.19

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Co-création : quand le consommateur intègre le processus de conception

Karl Lagerfeld/H&M, Rihanna/Dior, Kanye West/Adidas … en quelques années, les co-créations entre marques et célébrités sont devenues un passage obligé pour tous les secteurs, notamment celui de la mode. Mais depuis peu, la tendance se diversifie, impliquant non plus des stars mais le consommateur. Démocratisation d’internet, transformation de la demande et de la manière d’acheter, le consomm’acteur s’interroge de plus en plus, trouve plus facilement des réponses à ses questions, se fait rapidement une opinion sur le produit … et n’hésite plus à communiquer son ressenti aux marques.

Il initie alors un début de conception commune, une co-création que les marques, attentives à ces besoins émergents, inscrivent désormais dans leurs stratégies marketing. S’ils étaient écartés du processus de gestation et de fabrication, s’ils subissaient les tendances, les clients sont aujourd’hui associés à la “construction d’une nouvelle gamme de produits et/ou services,  au travail de la relation et parcours clients à des moments clés, et l’enrichissement de l’expérience utilisateur”. Pour le meilleur et pour le pire ?

PAS DE CO-CRÉATION SANS RÉSEAUX SOCIAUX

A l’origine de cette mutation, les réseaux sociaux bien sûr, qui ont fortement influencé la logique de l’acte d’achat, initiant des comportements inédits. Les consommateurs sont connectés en permanence sur internet via leur smartphone ; c’est une occasion rêvée pour les marques de créer du lien, de se rapprocher de leur cible pour se faire connaître d’abord, puis vendre produits et/ou services. Exposés en temps réel à une multitude d’informations qu’elles leur fournissent, les internautes peuvent donc échanger très facilement avec les marques, qui capitalisent sur la relation client, projetant ainsi une image plus naturelle et spontanée d’elles-mêmes.

Elles surfent donc sur la spontanéité des consommateurs, qui n’hésitent plus à échanger entre eux, partageant leurs avis au sein d’écosystèmes et d’applications en vogue comme Tripadvisor, La fourchette ou l’appli beauté Treatwell, ainsi que sur les réseaux sociaux où ils ne se gênent pas pour faire part de leur ressenti, positif ou négatif. Le social media est devenu le support conversationnel des internautes, un véritable Graal pour les marques car elles peuvent prendre en compte les commentaires et décider ou non de s’améliorer pour coller aux attentes des consommateurs.

Et varier les formes de co-création, avec par exemple la co-promotion, plus tournée vers la publicité. Les marques mettent à disposition des contenus viraux surfant sur les tendances social media pour tous les internautes. Les contenus sont tellement “cool” qu’on se les approprie pour les partager sur les réseaux et qu’on les utilise dans la communication de soi : du coup, les internautes, s’accaparant ces contenus, partagent eux-même la marque. Ainsi les Lenses sur Snapchat : l’usager diffuse la publicité de la marque à sa communauté en se l’appropriant… et la marque, en infiltrant cette communauté, bénéficie d’une promotion gratuite auprès d’un plus large public. En résumé, les individus contribuent ici à la visibilité d’une enseigne, volontiers, naturellement… et sans attendre la moindre récompense. Intelligent, non ?

IMPLICATION ET TRANSPARENCE

Outre cette visibilité accrue et gratuite, les marques, en englobant ainsi les internautes dans leur stratégie de promotion, ont l’opportunité identifier les attentes pour ensuite créer des offres qui y répondent réellement et améliorer leurs ventes.

Prenons l’exemple de But qui a lancé fin 2016 une stratégie d’entreprise “100% client” : « Demain, on pourrait imaginer des conseils en ligne et/ou l’intervention d’une personne à domicile. On ne sait pas quelle forme pourrait prendre ce conseil que nos clients attendent, c’est pourquoi nous les questionnons directement », admet Cécile Degois, chef de produit service marchand dans un article de LSA-Conso.fr.

Décathlon a également mis en ligne en 2014 une plateforme de co-création : Oxylane permet aux amateurs sportifs de s’exprimer sur des idées de nouveaux produits et de participer à divers challenges. Les idées les plus créatives et innovantes remportent le prix du « Oxylane Innovation Award. Ce sont des produits pensés par la communauté de sportifs, désormais accessibles en magasin.”

Impliquer le client dans la stratégie de développement, c’est aussi l’occasion de faire acte de transparence en le parachutant au cœur du siège de la marque pour les séances de travail voire même dans les usines. On a alors la possibilité de travailler la proximité avec la cible, d’augmenter le capital sympathie de la marque et de multiplier interactions et diffusion de contenus sur internet. Les marques qui prennent le temps d’écouter et d’inclure les consommateurs voient leur valeur reconnue par ces derniers, surtout lorsqu’ils se sont investis dans le processus de création. Ils aident alors la marque de deux façons, en créant des offres qui répondent aux besoins des consommateurs et en maximisant la fidélisation.

L’EMPOWERMENT DU CONSOMMATEUR ?

En étant intégré au processus de création du produit et/ou service, le consommateur s’intègre dans une communauté et porte sa voix pour faire valoir ses opinions. Il prend plaisir à échanger avec des individus qui lui ressemblent sur des sujets qui le concernent. Lego va dans ce sens avec sa plateforme “Lego ideas”: les internautes proposent des idées à la communauté puis votent pour les produits qu’ils préfèrent. Ils échangent avec leurs pairs mais peuvent surtout créer un produit selon leurs attentes et leurs vœux et le voir commercialiser via la marque, ce qui contribue au renouvellement des gammes et du catalogue.

Le véritable attrait va donc être de s’inscrire dans le projet, de proposer ses idées, de s’intégrer dans une communauté et d’être écouté et pris en compte. D’être reconnu. Beaucoup plus exigeant, le consommateur va s’engager, menant diverses missions, renforçant la cohésion de groupe, quitte à créer sa propre marque pour contrer ces grandes enseignes qui ne répondent plus à ses attentes. C’est le pari de « C’est qui le patron ? », site lancé en 2016, où ce sont les usagers qui fixent le prix et déterminent les critères du produit, reprenant ainsi le pouvoir en élaborant en ligne le cahier des charges qui correspond à leurs attentes en termes de qualité. Cette initiative montre un réel empowerment du consommateur. Et questionne la face cachée de cette stratégie.

Car si la co-création favorise un très bon rendement commercial et les marques soucieuses de répondre aux besoins de ses consommateurs, n’y-a-t-il pas derrière tout ça une forme de travail dissimulé ? Il faut bien l’avouer : en contribuant au développement des produits et à l’organisation des entreprises, les consommateurs endossent les rôles de communicant, de marketeur, de co-designer, voire de co-concepteur. Des métiers à part entière. Sauf que le consommateur n’est absolument pas reconnu en tant que tel, encore moins payé pour, demeurant au stade d’adjuvant amateur tout en vampirisant à son corps défendant une grosse partie du travail des employés de l’entreprise ; qu’en est-il alors de ces professionnels qui étaient chargés de s’occuper de la création du produit/service ?

ET DEMAIN ?

Aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, les consommateurs participent davantage et de manière active au développement de la marque, à l’amélioration de son image, et à la proposition de nouvelles offres. Toute puissance des réseaux sociaux, démocratisation des plateformes collaboratives instaurées par les marques : ils se retrouvent en première ligne comme influenceurs, acteurs et co-concepteurs. C’est la logique inhérente à la co-création … et cela engendre bien des questions : à partir de quel moment ces consommateurs passent-ils la limite pour devenir des travailleurs qui s’ignorent ? Quand seront-ils reconnus officiellement comme conseillers ? Faudra-t-il les rémunérer et de quelle manière ? Les marques créées par ces mêmes consommateurs à l’image de C’est qui le patron ? Seront-elles amenées à se multiplier ? Comment définir et encadrer la co-création entre marques et consommateurs afin d’éviter une sorte d’incohérence et de redonner sens à la notion de travail ? Autant que problématiques qu’il va falloir résoudre dans un avenir proche pour qu’elles ne discréditent pas à terme les enseignes qui pratiquent cette stratégie. Affaire à suivre donc.

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